Dans un futur proche, une nouvelle machine fait fureur.
Mieux que la télévision, le Dreammaster se connecte directement à votre crâne
pour vous immerger dans les scénarios de vos rêves les plus fous. Le Dreammaster
gomme vos angoisses, vous câline le cerveau. Avec lui, vous ressentez le
frisson de l’aventure sans encourir de risques. Avec lui, vous pouvez dormir en
paix. Confortablement. Aussi longtemps que vous le désirez.
Pour nous décrire ce nouvel opium du peuple, Norman Spinrad nous
colle la fameuse machine sur notre propre cerveau en optant pour un récit à la
seconde personne. S’enchaînent alors une multitude de flashs surréalistes et de
scènes fantasmagoriques dans un flux ininterrompu. Le parti pris littéraire est
tranché. Du coup, on accroche ou pas. Personnellement j’ai dévoré le livre. On
est quelque part entre Philip K. Dick pour les thèmes abordés (on pense
évidemment à Total Recall) et à William S. Burroughs pour le style façon cut-up.
D’ailleurs, même si j’ai beaucoup aimé le livre, j’émettrais une critique, ou
plutôt un regret : j’aurais aimé que Spinrad soit encore plus radical sur
la forme. Happé comme je l’étais par le récit, j’étais prêt à accepter une
logorrhée psychédélique interminable, un verbiage hypnotisant sans fin, à la
Burroughs ou à la Guyotat.
Une fois cette remarque faite, « Le temps du rêve »
reste un excellent livre. J’ai particulièrement aimé la structure du récit. On
passe progressivement de rêves « tout public » à des scénarios « interdit
aux moins de 12 ans » puis un peu « olé olé » (la pornographie
étant interdite). Vient ensuite la meilleure partie du livre, avec des virus
qui affectent le Dreammaster et créent des interférences cauchemardesques au
sein de rêves angéliques. Et enfin l’apparition d’un module antivirus qui vient
rétablir la douce berceuse.
Comme il le faisait déjà avec ses livres précédents, « Jack
Baron et l’éternité » en tête, Spinrad met en garde contre le contrôle des
masses, la société du spectacle, les médias et l’uniformisation de la pensée. Il
le fait cette fois sous une forme plus expérimentale qu’à l’ordinaire et j’espère qu’il
ira encore plus loin la prochaine fois.
Le Temps du Rêve, de Norman Spinrad, traduit de l'angalis
(USA) par Sylvie Denis et Roland C. Wagner, Ed. Fayard, 220 pages
J'étais curieux de voir d'autres avis. En voici un et je comprends parfaitement qu'on puisse y adhérer. Personnellement, ce n'était clairement pas ma came ;)
RépondreSupprimerOui, c'est le genre de trip littéraire où soit on est réceptif, on rentre dedans direct et on ne s'arrête plus; soit ça n'accroche pas et on s'ennuie ferme pendant 200 pages.
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